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Dans cet article, le département Culture Pop dirigé par Alexis Jacquemard et notre expert Camille Coste vous présente ce monument de la japanimation et de la culture manga.
DRAGON BALL
De Goku à Gohan. Des parents aux enfants. D’une génération à une autre.
Impossible de se montrer objectif à l’heure d’évoquer la saga Dragon Ball tant son histoire et ses personnages participent de souvenirs de jeunesse et des premières amours avec la culture nippone et la japanimation. Car l’œuvre d’Akira Toriyama n’est pas seulement un manga et une série d’animés mais aussi des cartes à jouer et des goodies qu’on s’échangeait à la récré ou des tentatives aussi répétées qu’infructueuses de se transformer en Super Saiyan ou réaliser un Kaméhaméha sous le préau. C’est en cela que Dragon Ball participe de la légende de toute une génération, au sens étymologique tiré du latin "legenda" : ce qui mérite d’être lu et raconté.
Le premier épisode du manga Dragon Ball parait le 3 décembre 1984 dans l’hebdomadaire japonais Shōnen Jump. Akira Toriyama s’y inspire du cinéma d’action Hong-Kongais et du classique de la littérature fantastique chinoise La Pérégrination vers l'Ouest de Wu Cheng En pour raconter les aventures de Son Goku, un enfant-singe doué pour les Arts Martiaux et se déplaçant sur un nuage magique à la recherche de sept boules de cristal permettant d’exaucer les vœux.
Jusqu’en 1995, son auteur dessinera 42 volumes de cette saga dont les seules ventes papier dépassent aujourd’hui les 230 millions d’exemplaires dans le monde, tandis que Dragon Ball et ses suites sont devenues un des grands phénomènes de la Pop Culture de la fin du XXe.
D’abord léger et dans un registre proche de Dr Slump (la précédente série à succès du mangaka qui relatait les aventures d’une malicieuse petite fille robot) Dragon Ball est d’abord accueilli tièdement par le public Japonais. Sur les conseils de son éditeur, Toriyama décide donc de faire évoluer sa série en introduisant des techniques de combat destructrices, des transformations en gorille-garou, un Dragon légendaire et des tournois d’Art Martiaux riche en rebondissements.
Les combats notamment emporteront l’adhésion des lecteurs de Shōnen Jump et Toriyama continuera de faire progresser son récit et ses héros autour de confrontations avec des créatures de plus en plus cruels et puissantes tandis que le manga est adapté puis diffusé en animé au Japon à partir de février 1986.
Et c’est d’abord sous cette forme de série télé[1] que Dragon Ball arrive en France avec une diffusion dans le Club Dorothée à partir du 2 mars 1988. Le succès d’audience est retentissant et en 1992, l’émission jeunesse rassemble plus d’un million de téléspectateurs le mercredi matin.
Pour autant (et comme souvent en présence d’une proposition culturelle novatrice et différente des normes de son époque), une partie de l’opinion publique critique de plus en plus vertement Dragon Ball et plus encore Dragon Ball Z[2]. Il faut dire que dans cette seconde série d’animée l’univers de Toriyama s’oriente vers plus de Science-Fiction (avec des ennemis qui deviennent extraterrestre et/ou génétiquement modifiées) et des combats toujours plus longs, spectaculaires et sanglants. Las des atteintes d’essayistes, des condamnations du CSA et de la pression d’associations de parents, TF1 décide finalement de déprogrammer le Club Dorothée et son dessin animé phare en 1996.
Pour autant et comme cela a pu être le cas pour les jeux vidéo ou la musique rock, cette défiance et ce rejet n’ont pas raison de la popularité de Son Goku et ses camarades. Au contraire même, la communauté des amateurs de Dragon Ball est aujourd’hui soudée autour d’une véritable mythologie moderne et intemporelle, qui parle autant à la génération du Club Dorothée qu’aux plus jeunes qui en ont entendu parler par leurs parents ou par des références d’autres pans de la culture populaire[3].
Dragon Ball est ainsi et assurément intemporel et reste vecteur de valeurs certes simples mais positives comme le courage, la persévérance, l’amitié ou la fidélité. Evidemment, ce n'est pas toujours approfondi, mais c’est souvent juste et parfois même émouvant. Et c’est avec la même émotion que la génération passée regardera d’un œil attendri une énième rediffusion du dessin animé culte, sans être dupe de ses qualités formelles mais avec, toujours, la charge affective des souvenirs et le plaisir d’un dialogue avec la nouvelle génération d’amateurs.
[1] le manga n’étant adapté sous son format papier par les éditions Glénat qu’à partir de 1993
[2] communément dénommé suivant ses initiales « DBZ », cette série animée fait suite à Dragon Ball et adapte les vingt-six derniers volumes du manga, publiés de 1988 à 1995.
[3] on pensera notamment au Hip-Hop contemporain qui foisonne de sample des thèmes musicaux de DBZ ou de punchlines par lesquelles les rappeurs se revendiquent de personnages de la saga.
